
Le grand hall de l’École polytechnique, à Palaiseau (Essonne), est rempli de stands, ce mercredi 17 mai. En effet, 66 équipes présentent leur projet. Elles sont constituées d’élèves de premières et de terminales S-SI (sciences de l’ingénieur ; équivalent de l’ancien bac E) et STI2D (sciences et technologies de l’industrie et du développement durable) qui participent à la finale nationale de la huitième édition des olympiades des Sciences de l’ingénieur (1), organisées par l’Union des professeurs de sciences et techniques industrielles (UPSTI). Au fil des ans, les Olympiades sont devenues le plus grand concours national de sciences et technologies, avec un total cette année de 1 350 équipes de lycéens qui ont participé aux différentes épreuves académiques. En ce jour de finale, chacun des 300 lycéens et professeurs présents va recevoir la visite de deux jurys, constitués de trois membres, professeurs et industriels.

Une grande variété de projets
Ce qui frappe au premier abord, c’est la diversité des projets. De la serre autosuffisante au système de sécurité innovant pour piscines domestiques, en passant par la barrière intelligente pour protéger les bébés ou la mini-hydrolienne destinée aux randonneurs. L’imagination est reine et la motivation des élèves palpable. Certaines présentations devant les jurés atteignent un niveau professionnel, avec des diapositives pertinentes. «Ils se sont entraînés», glisse un juré. C’est vrai — et certains directeurs de marketing pourraient en rougir !
Hervé Riou, président de l’UPSTI et professeur en classes préparatoires au lycée Chaptal à Paris 8e, insiste sur l’apport des Olympiades. «Une majorité des participants des années passées ont poursuivi des études scientifiques. Certains projets ont donné lieu à des dépôts de brevet et même à des produits commercialisés. Cette première expérience en mode projet les aide pour la suite de leurs études.» Une analyse partagée par Norbert Perrot, doyen du groupe STI de l’Inspection générale. «Vous avez découvert la concurrence, si importante en ingénierie, insistait-il, lors de la cérémonie de remise des prix. L’emploi est au bout de ces études.»
Ceux qui repartent sans avoir été distingués ne doivent pas baisser les bras. «Des candidats malheureux sont parfois remarqués lors d’un autre concours international par la suite, remarque Vincent Honorat (Ai. 97), membre de l’UPSTI et du comité d’organisation des Olympiades. Nous les encourageons à continuer, à diffuser l’information.» Cela a été le cas pour le lycée Parc-Chabrières d’Oullins (Rhône), qui a représenté la France en 2013 au Stockholm Junior Water Price. Vincent Honorat souligne la grande qualité des travaux présentés et la pertinence des élèves, qui «trouvent des idées que nous n’aurions pas eues».
Les ambassadeurs d’Arts et Métiers sur le pont
Ce rassemblement des meilleurs lycéens des classes techniques est aussi l’occasion pour l’École d’Arts et Métiers de se faire mieux connaître avec l’aide d’étudiants-ambassadeurs. Adrien Milani (Cl. 215) et Oriana Peltzer (Bo. 215), deux étudiants en deuxième année, ont passé la journée à Polytechnique. «Les Olympiades sont importantes pour faire connaître l’École, explique le premier. De nombreux lycéens brillants ne pensent pas forcément à une formation d’ingénieur.» La seconde, membre de l’association «Elles bougent», avait eu l’occasion de faire une présentation dans le cadre du club robotique d’Arts et Métiers. «Cette expérience m’a plu, j’ai donc tout de suite accepté de venir aux Olympiades pour parler avec les élèves.»
Les gadzarts sont aussi largement représentés. Pour Roger Stanchina (Ai. 70), président de la Fondation Arts et Métiers, «les Olympiades répondent aux objectifs de soutien à la formation à la technologie et d’encouragement à l’innovation de la Fondation. Nous avons soutenu cette initiative dès le début et nous aidons à son organisation. De nombreux gadzarts, professeurs ou travaillant dans des entreprises industrielles, sont jurés. Les projets présentés nous aident également à mieux appréhender la sensibilité des jeunes aux nouvelles technologies et démontrent l’importance prise par l’électronique. L’évolution vers la mécatronique, particulièrement attrayante pour les jeunes, est très nette. On trouve également de plus en plus de systèmes de commande par smartphone, d’utilisation de la réalité virtuelle. Dans le même temps, les jeunes découvrent l’importance de la partie mécanique et le plaisir de fabriquer un prototype de ses propres mains.»
Des heures de modélisation
Lors de la remise des prix, Luc Chevalier, professeur à l’université Paris-Est-Marne-la-Vallée, a justement rappelé les critères principaux qui ont guidé les jurys : pluridisciplinarité, innovation, critères fonctionnels, démarche de l’ingénieur, «car il ne suffit pas d’avoir une bonne idée. Il faut la modéliser, l’expérimenter, réaliser des mesures pour comparer avec le modèle» et, enfin, savoir convaincre. Plusieurs équipes ont presque atteint la note maximale.
La plupart des élèves reconnaissent qu’ils ont largement dépassé les heures officiellement imparties dans le cadre des études. Ils utilisent déjà des logiciels professionnels : Solidworks (conception assistée par ordinateur) est le plus souvent cité avec Mathlab (calcul numérique), mais ce sont aussi des outils de simulation, de développement, d’électronique, de mécanique des fluides… Les imprimantes 3D sont souvent sollicitées pour fabriquer la maquette, malgré les imperfections des machines d’entrée de gamme. Ç’a été le cas pour le projet du lycée Léonard-de-Vinci de Montaigu (Vendée) : un robot culinaire à poser sur une casserole. Le professeur de technologie leur a, sans le vouloir, donné l’idée lors d’une boutade. «Au lieu de brasser ma béchamel, je préférerais aller prendre l’apéro», leur avait-il lancé. Ses élèves l’ont pris au mot ! Les lycéens de Blaise-Pascal, à Châteauroux (Indre), se sont heurtés, eux, à la précision insuffisante des capteurs économiques utilisés sur son gant pilotant à distance une main robotique, mais ils ont prouvé la validité du concept. Et cherché des appuis : «Jean-Loup Chrétien nous a dit qu’un tel système pourrait être utile dans l’espace, pour manipuler plus facilement des outils», indique l’un des lycéens.
La sélection par les lycées des candidats varie d’un établissement à l’autre. L’idée peut venir des élèves eux-mêmes : ainsi, ayant repéré une affiche, une équipe a entraîné cette année son lycée dans son sillage. D’autres lycées sont de vieux routiers, comme Albert-Londres, à Cusset (Allier). Les professeurs jouent pleinement leur rôle pour motiver leurs élèves, et chacun a sa méthode : dès le début de l’année pour les uns, au bout de deux, trois mois pour les autres, histoire de ne pas stresser les adolescents dès le début de l’année. Quelle que soit la méthode, tous les élèves finalistes étaient motivés et enthousiastes.
Trois projets sur le podium
BeerTech permet à un brasseur artisanal de planifier sa production à flux tendu, ce qui lui épargne la surproduction par crainte de la rupture de stock. Car ce surplus est souvent perdu, les levures ayant une courte vie. Le système mesure précisément le flux sortant de chaque fût, ces données sont analysées puis présentées sur une page web qui informe le brasseur en temps réel de la consommation. BeerTech utilise un capteur à effet Hall installé sur chaque fût dont la précision (1,5 %) est optimisée grâce à une modélisation qui prend en compte la durée de chaque rotation du capteur.
BatTrust est un gilet équipé de radars
Fournir un kit de motorisation aux personnes à mobilité réduite pour qu’elles profitent |
(1) Tous les résultats sont sur le site de l’UPSTI, à la rubrique «événement» : www.upsti.fr